Portrait: Youri Messen-Jaschin
J'ai découvert Youri Messen-Jaschin en mai 2017 lors des journées "Aperti" qui permettent de visiter différents ateliers de créateurs de la région lausannoise. Le sien se trouve au neuvième étage d'un immeuble des années 60 de Valmont - un quartier de tours aux antipodes des milieux "bohême"... L'homme qui m'a ouvert la porte n'était pas banal non plus, les couleurs de ses habits vous sautant au visage comme un tableau pop des sixties.
Youri Messen-Jaschin ne fait pas du pop art, mais de l'op art: il crée sur différents supports (tapisseries, tableaux, sculptures en plexiglas, etc.) des oeuvres jouant sur l'illusion optique, vibrant selon le déplacement de notre regard. Il est un spécialiste des couleurs, arrive même à les faire surgir par le jeu de fines lignes en noir et blanc. Ses oeuvres, très élaborées, sont exposées dans des musées et des collections du monde entier; il fait aussi du "body painting" et a créé des timbres pour la Poste suisse. A 76 ans, plus jeune que jamais, il mène avec un professeur du Centre hospitalier et universitaire de Lausanne une recherche scientifique pour comprendre les effets qu'exerce l'art optique sur notre cerveau.
Bien que n'étant pas a priori amateur d'op art, trop "froid" à mon goût, j'ai été impressionné par la pédagogie de Youri Messen-Jaschin, la constance de ses recherches depuis plusieurs décennies et la façon qu'il a de se mettre en scène avec un sens de l'humour décalé qui m'a rappelé - souvenirs, souvenirs... - le mythique Jean-Christophe Averty. C'est ainsi que je l'ai recontacté pour lui proposer de faire son portrait photographique, ce qu'il a accepté avec amabilité.
L'op art se prêtant mal à la reproduction sur papier ou écran, j'ai voulu éviter le piège de le photographier au milieu de ses oeuvres dans une débauche de formes bariolées. Pour commencer, j'ai même choisi le parti-pris inverse du portrait classique, visage en gros plan et éclairage studio. Mais Youri Messen-Jaschin étant qui il est, c'est-à-dire un homme qui pousse à expérimenter, nous avons enchaîné sur quelques poses moins conventionnelles, notamment avec ses lunettes qui ne passent pas inaperçues. Dans ces autres images, j'ai essayé de suivre un fil rouge propre à son travail - "n'en croyez pas vos yeux"...
© Jean-Claude Péclet. Reproduction soumise à autorisation